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L’ÉTAT AU POINT DE VUE DU MÉCANISME.

tains dignitaires de l’Église et à toucher les revenus de leurs charges pendant qu’elles étaient vacantes, ainsi que le prix d’achat payé par les nouveaux titulaires. L’ambassadeur de Venise. Paolo Capello[1], rapporte en 1500 ce qui suit : « Toutes les cuits on trouve à Rome quatre ou cinq personnes tuées : ce sont des évéques, des prélats et d’autres individus ; aussi tous les habitants delà ville tremblent-ils d’être assassinés par le duc César. » La nuit, il parcourait lui-même avec ses gardes la ville effrayée[2], et l’on a tout lieu de croire qu’il le faisait, non parce qu’il ne voulait plus, nouveau Tibère, montrer au grand jour son visage devenu horrible, mais parce qu’il avau besoin d’assouvir sa soif de meurtre, même sur des inconnus. Dès 1499 l’indignation générale était devenue si grande que le peuple attaqua et mit à mort un grand nombre de gardes pontificaux[3]. Ceux que les Borgia ne frappaient pas de leur poignard périssaient par leur poison. Dans les cas où la discrétion semblait nécessaire, on employait cette poudre blanche comme la neige, agréable au goût[4], qui ne foudroyait pas, mais qui agissait lentement et qui pouvait se mêler, sans qu’on s’en aperçût, à tous les aliments et à toutes les boissons. Le prince Dschem en avait absorbé avant d’étre livré par Alexandre à Charles VIII (1495), et à la fin de leur carrière le père et le fils furent eux-mêmes

  1. Tomraaso Gar, p. 11. Pour la période qui commence le 22 mai 1502, on trouve des renseignements précieux dans Dispœct di Antoiiio Giustiniani, pubi, par Pasquale Villari , Firenze, 1876, 3 vol.
  2. Paulus Jovius, Elogia, p. 202, Cæsar £orgia. ■— Le livre XXII des Commeniarii urbani de Raph. Voleterranus contient un portrait d’Alexandre, tracé d’une main très-prudente, bien qu’il ait été fait sous Jules 11. On y lit : Roma... nobilit jam carnijicina facto erat.
  3. Diario Ferrarese, daus Mürat., XXIV, COl. 362.
  4. Paul. JOviüS, Histor., II, fol.JÎZ.