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qui nous menaçaient, leur montraient assez combien j’étais alarmé ; mais rien de tout cela n’a pu les engager à me suivre.

Charité. Mais quelles raisons ont-ils alléguées pour s’excuser de ne pas vous accompagner ?

Chrétien. Ma femme ne pouvait se résoudre à renoncer au monde, et mes enfants étaient retenus par leur goût pour les vains plaisirs de la jeunesse, de sorte que, sous un prétexte ou sous un autre, ils ont tous refusé de me suivre.

Charité. N’auriez-vous point détruit par votre conduite l’effet des paroles par lesquelles vous cherchiez à les engager à vous suivre ?

Chrétien. Pour dire la vérité, je ne puis, je l’avoue, faire l’éloge de ma conduite ; car je sens qu’à plusieurs égards elle n’était pas ce qu’elle aurait dû être. Je n’ignore pas non plus qu’il est bien facile de détruire par sa manière de vivre l’influence des exhortations qu’on adresse au prochain pour son bien. Cependant, j’ose affirmer que je craignais beaucoup de faire quoi que ce soit qui pût détourner ma famille de partir avec moi ; au point qu’ils m’accusaient d’une trop grande rigidité, et disaient que je me refusais des choses auxquelles ils ne voyaient aucun mal. Je crois même pouvoir dire que, si quelque chose dans ma conduite leur a été en scandale, c’est surtout le soin que j’ai mis à ne pas offenser Dieu et à ne faire aucun tort à mon prochain.