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Chrétien. J’ai une femme et quatre enfants.

Charité. Et pourquoi ne les avez-vous pas amenés avec vous ?

Alors Chrétien répandit quelques larmes et dit : Oh ! quelle joie j’aurais éprouvée si j’avais pu les prendre avec moi ; mais ils désapprouvaient tous hautement mon projet de voyage.

Charité. Mais vous auriez dû leur parler et leur représenter le danger auquel ils s’exposaient en demeurant en arrière ?

Chrétien. C’est ce que j’ai fait. Je leur ai dit que Dieu m’avait déclaré que notre ville serait détruite ; mais ils ont traité de folie tout ce que je leur disais, et n’ont pas voulu me croire[1].

Charité. Et avez-vous prié Dieu de bénir les exhortations que vous leur avez adressées ?

Chrétien. Assurément, de tout mon cœur ; car ma femme et mes pauvres enfants me sont bien chers.

Charité. Mais leur avez-vous exprimé votre douleur et la crainte que vous aviez de la destruction qui vous menaçait ? Car je suppose que, quant à vous, vous n’aviez aucun doute sur le sort auquel vous étiez exposé ?

Chrétien. Je ne cessais de leur en parler. D’ailleurs, l’expression de ma figure, mes larmes, et le tremblement qui me saisissait à la pensée des jugements

  1. Gen. XIX, 14.