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de la foire, plus éclairés et moins acharnés que les autres, commencèrent-ils à reprendre et à blâmer ceux qui se portaient à toutes ces extrémités contre les pèlerins. On accueillit leurs réprimandes en les injuriant à leur tour, en leur disant qu’ils ne valaient pas mieux que les prisonniers, que sans doute ils étaient d’accord avec eux, et qu’ils méritaient d’être traités comme eux. Ils répondirent qu’ils ne voyaient pas ce qu’on pouvait reprocher aux prisonniers, que c’étaient des gens paisibles, de sens rassis, et qui n’avaient l’intention de faire de mal à personne. Ils ajoutèrent qu’il y avait bien des gens dans la ville qui méritaient mieux que ces pauvres voyageurs d’être enfermés dans une cage, ou même d’être mis au carcan. Des paroles on en vint bientôt aux coups, et ils se maltraitèrent les uns les autres, tandis que les pèlerins continuaient à leur donner l’exemple de la modération et de la douceur. Mais, loin de leur en savoir gré, on les ramena une seconde fois en présence de leurs juges, et on les accusa d’être les auteurs des nouveaux troubles qui venaient d’avoir lieu. Pour cette fois, on les fit cruellement fustiger, on les chargea de fers, et on les promena enchaînés d’un bout de la foire à l’autre pour inspirer une salutaire terreur à tous ceux qui seraient tentés de prendre leur défense ou de se joindre à eux. Mais Chrétien et Fidèle ne démentirent pas leur conduite passée, et se soumirent avec tant de patience et de douceur à la honte et à l’ignominie dont on les accablait, que quelques personnes