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CHAPITRE LVI


C’était un singulier spectacle que de voir un homme comme Glanville, avec ses goûts dispendieux, ses habitudes de luxe, de grandes facultés particulièrement propres à le mettre en relief, courtisé par les personnages les plus élevés dans l’État, admiré de plus de la moitié des femmes de Londres, vivre d’une vie ascétique, loin du contact de ses semblables, et se complaire dans le plus sombre et le plus maladif désespoir. Pas une femme ne pouvait se vanter d’avoir eu la bonne fortune de fixer un instant ses regards. Il vivait au milieu des livres, et semblait ne vouloir d’autre compagnie que le passé. À toute heure de la nuit il veillait et travaillait et il faisait à peine jour que déjà on lui amenait son cheval. Il faisait une promenade de plusieurs heures, et à son retour, il employait tout le temps qui précédait son départ pour le parlement, à s’occuper des affaires et de la politique du jour. Dès son début, il n’avait cessé de prendre une part active à tous les débats importants, et ses discours avaient toujours eu cette supériorité et cette élévation de vues, qu’on avait remarquées chez lui le premier jour où il avait pris la parole. Chose singulière ! dans ses discours parlementaires, comme dans sa conversation ordinaire, on ne retrouvait ni ces opinions violentes et spéculatives, ni cet enthousiasme romanesque, où semblait l’incliner la tendance naturelle de son esprit. Ses arguments étaient toujours remarquables à cause de