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CHAPITRE XLIII


Deux jours après ma longue conversation avec Tyrrell, je voulus de nouveau rendre visite à ce digne personnage. À ma grande surprise j’appris qu’il avait quitté Cheltenham. Je me rendis alors chez Vincent que je trouvai couché selon son habitude, sur son sofa, et entouré de livres et de papiers.

« Entrez, Pelham ! me dit-il comme j’hésitais sur le seuil de sa porte, entrez. Je me suis amusé avec Platon toute la matinée. Je ne comprends pas pourquoi les anciens ont tant de charme pour nous. Je serais porté à croire avec Schlegel que c’est à cause de cet air de repos parfait, de ce calme de l’âme que respirent tous leurs écrits. Tout ce qui chez nous n’aurait l’air que de lieux communs acquiert chez eux je ne sais quelle élévation et quel pathétique. La trivialité chez eux paraît de la profondeur, la hardiesse extravagante semble l’élan d’une imagination luxuriante. Le fait est, qu’en dépit de tous leurs défauts, vous y trouvez partout des traces d’une grande originalité de pensée ; il y a je ne sais quelle grandeur contemplative dans leurs idées qui n’a rien d’emprunté dans la forme. Prenez, par exemple, ces fragments de Mimnermus sur la brièveté de la vie ; y a-t-il un sujet qui paraisse plus commun ? y a-t-il rien de moins saisissant que les sentiments qu’il exprime ? Et cependant on y trouve à chaque ligne une profondeur de mélancolie douce et tendre qu’il est impossible de définir. De tous les écrivains anglais qui possèdent le mieux cet