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mes nouvelles études. Lorsque mon oncle m’eut mis en possession de principes certains et définis, nous commençâmes à les confirmer par des faits. Par exemple, lorsque nous eûmes fini l’essai sur le gouvernement, nous examinâmes les différentes constitutions de l’Angleterre, de l’Amérique Anglaise, et de la France, les trois pays qui ont la prétention d’avoir le meilleur gouvernement, et nous fûmes en état de bien voir et de bien apprécier les défauts et le mérite respectifs de chacun de ces systèmes. Pourquoi ? Parce que nous avions avant cet examen commencé par établir certaines règles d’investigations et de contrôle. Mon scepticisme à l’endroit des faits fut ce qui contribua le mieux à me donner une instruction positive. En effet, je n’avais pas de préjugés à combattre ; pas de notions vagues glanées çà et là dans mon passé, pas de ces maximes populaires auxquelles on tient quelquefois comme à des vérités.

Chaque chose défilait pour ainsi dire devant moi comme devant un juge impartial, le prestige, l’illusion de sectes ou de partis n’existaient point pour moi. Chaque argument, chaque opinion étaient soumis à l’épreuve rigoureuse de la logique. Enfin, en peu de temps, je pus reconnaître la justesse des prévisions de mon oncle, en voyant combien mon instruction était devenue plus solide. Nous parcourûmes tous les admirables articles de Mill dans l’Encyclopédie, les livres les plus populaires de Bentham, puis nous nous enfonçâmes dans les profondeurs de l’économie politique. Je ne sais pas pourquoi l’on a dit que cette science manquait d’intérêt. Je ne m’y fus pas plus tôt appliqué que je ne pus plus m’en arracher. À partir de ce moment, je n’ai jamais cessé d’en faire l’objet de ma constante application, moins à titre d’étude que par amusement. Mais à cette époque, le but de mon oncle n’était pas de faire de moi un profond économiste. « Si je désire, me disait-il, vous faire connaître les principes de cette science, ce n’est pas pour vous mettre en état d’en faire parade, c’est pour vous sauver du reproche de l’ignorer complètement ; ce n’est pas pour vous faire découvrir la vérité, c’est pour vous faire reconnaître l’erreur. De toutes les sciences,