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— Oh ! répondis-je, il est certain qu’il n’y a rien d’aussi respectable, en Angleterre, que les intérêts de notre commerce. Un homme qui s’est fait lui-même en vaut mille de ceux qui ne sont quelque chose que par leurs ancêtres.

— C’est très-vrai, monsieur Pelham, » dit le marchand de vin en rapprochant sa chaise de la mienne. Alors, posant sur mon bras un de ses doigts gros et courts, il me regarda en face, d’un air investigateur et me dit : « La réforme parlementaire, qu’est-ce que vous dites de cela ? Vous n’êtes pas partisan des anciens abus et de la corruption moderne, je suppose, monsieur Pelham !

— Pas le moins du monde ! m’écriai-je avec un air d’honnête indignation. J’ai une conscience, voyez-vous, monsieur Briggs, j’ai une conscience, comme homme public, non moins que comme homme privé !

— Admirable ! s’écria mon hôte.

— Non, continuai-je, en m’animant de plus belle, non, monsieur Briggs, je ne veux pas ici faire parade de mes principes avant d’avoir montré ce que je peux faire. Le moment de proclamer ses principes ne vient que quand on en a montré les bons effets en les mettant en action. Je ne veux pas, monsieur Briggs, vous demander votre voix comme une faveur, ainsi que le fera peut-être mon adversaire. Il s’agit ici d’une confiance mutuelle entre mes commettants et moi. Quand je me présenterai de nouveau devant vous, il faut que vous ayez le droit de me demander compte de la façon dont j’aurai pu répondre à votre confiance comme votre représentant. Monsieur Briggs, j’ose dire que cette manière de me présenter à vous peut paraître sans gêne et fort impolitique, mais je suis un homme tout rond ; je dis les choses crûment, et je dédaigne l’art vulgaire des menées électorales, monsieur Briggs !

— Donnez-nous un coup de main, s’écria le marchand de vins transporté, oui, un coup de main, et je vous promets mon appui, enchanté de voter pour un jeune gentleman qui a des principes aussi excellents ! »

Et voilà, cher lecteur, comment M. Briggs devint, depuis cette entrevue, l’un de mes plus fermes soutiens. Je ne