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time avec un homme qui me tournait le dos, mais que je reconnus aussitôt pour Tyrrel.

« Oh ! il ne tardera pas à venir, dit le premier, et nous le saignerons dans les règles ce soir. C’est singulier que vous qui jouez beaucoup mieux que lui, vous ne l’ayez pas plumé hier soir ! »

Tyrrel répondit à voix basse et je ne pus l’entendre ; un instant après, la porte s’ouvrit et Warburton entra. Il se dirigea aussitôt vers Thornton et son compagnon, et après les salutations d’usage, Warburton dit de ce ton de modulation artificielle qu’il avait l’habitude de donner à sa voix : « Je suis sûr, Tyrrel, que vous avez hâte de prendre votre revanche. Perdre contre un novice comme moi, c’est plus qu’il ne faut pour doubler le chagrin de la défaite et le désir des représailles. »

Je ne pus entendre la réponse de Tyrrel ; mais le trio disparut derrière une porte que je n’avais pas remarquée jusque-là, et qui donnait probablement entrée dans le boudoir de nôtre hôtesse. La soi-disant marquise le leur ouvrit elle-même et Thornton la remercia de ce bon office avec un clignement d’œil caractéristique, tout à fait digne de sa réputation de galanterie. Aussitôt que la porte se fut refermée sur eux, j’allai droit à la marquise, et, après quelques compliments préliminaires, je lui demandai si la chambre où messieurs les Anglais étaient entrés, était également ouverte à tous les invités.

« Oh ! me dit-elle avec quelque hésitation, ces messieurs jouent plus gros jeu qu’on ne fait ici d’habitude, et l’un d’eux est sujet à s’irriter des avis et des réflexions de la galerie. Hier soir, après qu’ils eurent joué pendant quelques instants seulement, M. Thornton, un vieil ami à moi (ici la dame baissa les yeux) me demanda la permission de se retirer avec ses amis dans la chambre du fond, et comme je le connais bien, je n’ai eu aucun scrupule à lui accorder ce qu’il me demandait !

— Alors je suppose, lui dis-je, que, en ma qualité d’étranger, je n’ai pas la permission d’aller les rejoindre.

— Voulez-vous que je le leur demande ?

— Non, ce n’est pas la peine. » En conséquence je me rassis