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active et empressée formaient les traits distinctifs de son caractère. Je l’ai vu endurer avec une patience et une bonté sans égale, les provocations les plus injurieuses de la part de camarades plus faibles que lui. Mais que moi ou quelque autre de ses amis intimes, nous vinssions à être injuriés ou attaqués, sa colère était implacable. Quoiqu’il fût d’une complexion délicate, il était arrivé, par un exercice précoce, à donner de la force à ses muscles et de l’agilité à ses membres. Il avait de plus du courage et une volonté ferme, et par là il conquit toujours, en dépit de sa réserve et de son impopularité, le premier rang parmi nous, dans les exercices où nous faisions, encore enfants, l’essai des qualités qui contribuent puissamment plus tard, lorsqu’on est devenu homme, à vous assurer une bonne situation dans le monde.

Tel était, autant qu’une ébauche imparfaite peut en donner l’idée, le caractère de Réginald Glanville, celui de tous mes jeunes compagnons qui différait le plus de moi, mais aussi celui que j’aimais le plus et dont la destinée devait être par la suite le plus étroitement enlacée à la mienne.

J’étais dans la première classe lorsque je quittai Eton. Comme je passais pour un enfant remarquablement bien élevé, il ne sera peut-être pas sans intérêt pour les admirateurs du système actuel d’éducation, de faire ici une pause et d’apprendre quelle était alors l’étendue de mes connaissances. — J’étais en état de faire cinquante vers latins en une demi-heure ; je pouvais expliquer, sans me servir d’une traduction anglaise, tous les auteurs latins faciles, et, à l’aide d’une traduction, quelques-uns des auteurs difficiles. — Je lisais couramment le grec et je pouvais même le traduire, à l’aide de la traduction interlinéaire, qu’on appelle communément un guide-âne[1]. On me considérait comme

  1. La justice me fait un devoir de reconnaître que, depuis la publication de ce livre, notre système d’éducation dans les écoles publiques s’est singulièrement amélioré. À considérer ces grandes pépinières dans leur ensemble, on peut douter qu’il y ait au monde des établissements mieux raisonnés en théorie pour concilier leurs études classiques avec les habitudes viriles et les sentiments honorables, dont l’union forme le caractère distinctif du gentleman anglais.