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— Ce ne sera plus nécessaire. Arrangez-vous seulement de façon à ce qu’il vous accompagne jusque chez vous, et ne vous séparez de lui qu’à la porte.

— Arrêtez, arrêtez. Vous ne pouvez soupçonner Mme di Negra d’être de connivence avec son frère dans un acte aussi infâme. Pardonnez-moi, milord, je ne puis agir dans cette affaire, je ne puis pas même vous écouter, excepté à titre d’ennemi, si vous insinuez un seul mot défavorable à la femme que j’aime.

— Brave chevalier, donnez-moi la main. C’est Mme di Negra que je travaille à sauver tout autant que la fille de mon ami. Ne pensez qu’à elle tandis que vous agirez comme je vous le demande, et tout ira bien. J’ai confiance en vous. Maintenant, retournez vers le comte. »

Frank rejoignit Peschiera, le front soucieux et les lèvres serrées. Harley avait ce don qui fait partie du génie de l’action : il inspirait aux autres la lumière de son esprit et la force de sa volonté. En quittant Frank, il se rendit en toute hâte chez lord Spendquick, conféra quelques minutes avec le jeune gentilhomme, puis retourna à son hôtel, où Léonard, le prince et Giacomo l’attendaient toujours. « Venez avec moi tous les deux, dit-il, et vous aussi, Giacomo. Il faut maintenant que je prévienne la police. Nous nous partagerons ensuite des missions séparées.

— Ah ! mon cher lord, s’écria Léonard, vous avez donc eu de bonnes nouvelles ? Vous paraissez content et plein d’espoir.

— Je parais ; dites donc que je suis plein d’espoir. Si je m’arrêtais un instant à craindre, à douter même, je deviendrais fou. Un ennemi à déjouer et un ange à sauver ! Quel courage ne serait enflammé ? Qui ne trouverait dans les battements de son cœur de quoi surexciter son intelligence ? »


CHAPITRE VII.

Le crépuscule était sombre dans la chambre où Béatrix avait conduit Violante. Un grand changement s’était opéré chez la marquise. Humble et repentante, elle était à genoux près de Violante, cachant sa figure, et la suppliant avec larmes de lui pardonner. Et Violante s’efforçant de lutter contre une terreur que le cœur d’aucune femme ne saurait braver, Violante essayait doucement de la consoler.

Béatrix, après des questions impérieuses et réitérées, avait enfin appris qu’elle s’était trompée, que Violante n’était pas sa rivale. À partir de ce moment les passions qui avaient fait d’elle l’instrument d’un crime s’étaient évanouies, et sa conscience avait frémi de la