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LIVRE III.


CHAPITRE I.

Ce fut grand dommage que M. Stirn n’entendît pas le sermon du curé ; mais ce digne fonctionnaire avait bien d’autres occupations ; et, de fait, pendant l’été on le voyait rarement à l’office du soir ; non pas qu’il craignît les sermons ; non, M. Stirn se serait ri des foudres mêmes du Vatican, mais il préférait s’occuper de nombreux travaux gratuits le jour du repos. Le squire permettait à tous ceux qui le désiraient de se promener dans son parc le dimanche, et bien des gens venaient de loin pour naviguer sur son lac ou se reposer à l’ombre de ses vieux hêtres. Ces visiteurs éveillaient les soupçons de M. Stirn ; bien plus, étaient pour lui une cause de tourment véritable, et cela non sans raison. Nous autres Anglais, nés avec l’amour de la liberté, nous sommes plus disposés à en faire l’abus sur les terres de notre prochain que sur les nôtres. Quelquefois, à sa grande satisfaction, M. Stirn tombait à l’improviste sur une bande de gamins occupés à assiéger les cygnes ; d’autres fois il s’apercevait qu’un jeune plant manquait et le trouvait dans des mains impies, converti en canne ; ou découvrait un hardi gaillard escaladant le saut de loup pour venir cueillir, dans une des plates-bandes chéries de la pauvre mistress Hazeldean, un bouquet pour sa bonne amie, et il arrivait même souvent, quand toute la famille était à l’église, que quelques curieux impertinents pénétraient jusque dans les jardins pour venir regarder aux croisées. C’était pour de tels crimes et pour d’autres aussi graves que M. Stirn avait depuis longtemps, mais en vain, fait tous ses efforts pour engager le squire à retirer une permission dont on abusait avec tant d’infamie. Mais, bien que M. Hazeldean grondât, tempêtât, jurât quelquefois « qu’il fermerait le parc ou qu’il le remplirait (malgré la loi) de pièges, de fusils à ressort, » sa colère s’évaporait toujours en paroles. Le parc restait ouvert au public le dimanche, et ce jour de repos se changeait pour M. Stirn en jour de peine et d’anxiété. Mais c’était depuis les derniers tintements de la cloche du service du soir jusqu’au coucher du soleil que l’âme de ce vigilant fonctionnaire était surtout agitée ; car, parmi les fidèles qui venaient des hameaux voisins se réunir à la voix du pasteur, il se trouvait toujours quelque brebis égarée, ou plutôt