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— J’en doute. Beaucoup de gens ont fait visite au squire dans la saison des chasses, qui auront entendu parler de vous, vous auront vu peut-être, et qui rencontreront probablement le comte à Londres. Puis Frank Hazeldean connaît aussi la sœur du comte.

— C’est vrai, c’est vrai, interrompit Riccabocca. Je comprends, et j’y réfléchirai. En attendant, vous allez à Hazeldean ; ne dites rien au squire ; il ignore le secret que vous avez découvert. »

Après ces paroles, Riccabocca fit un pas vers la maison, et Randal comprit qu’il devait se retirer.

« Quoi qu’il arrive, comptez toujours sur moi, » dit le jeune fourbe, et il alla reprendre son cheval.

Avant de repartir, il jeta les yeux vers la place où il avait laissé Riccabocca. L’Italien y était encore ; bientôt on vit sortir des bosquets le fidèle Giacomo. Riccabocca se retourna vivement, reconnut son domestique, laissa échapper une exclamation si bruyante que Randal l’entendit, puis prenant Giacomo par le bras, disparut avec lui sous les grands arbres du jardin.

« Si je puis le décider à s’établir dans le voisinage de Londres, pensa Randal, tout en s’en allant, j’aurai alors le champ libre pour courtiser et pour conquérir l’héritière. »


CHAPITRE VI.

« Sur mon âme, Harry ! s’écria le squire qui traversait le parc avec sa femme pour aller inspecter des south down de premier ordre dont il venait d’augmenter ses troupeaux, sur mon âme, je crois que c’est Randal Leslie qui s’efforce d’entrer dans le parc par la petite porte ! Holà Randal ! Il faut faire le tour par la loge, mon garçon, dit-il. Tu vois que j’ai fait fermer cette porte pour empêcher qu’on ne traversât le parc.

— C’est dommage, dit Randal, j’aime les chemins de traverse et vous en avez fermé un qui abrégeait beaucoup la route.

— C’est justement ce que disaient les gens du village, reprit le squire, mais Stirn l’a voulu. C’est un homme précieux que Stirn. Fais le tour par la loge, attache ton cheval et tu nous auras rejoints avant que nous soyons de retour à la maison. »

Randal sourit, fit un signe d’assentiment et mit son cheval au galop.

Le squire rejoignit sa femme.

« Oh ! William, dit celle-ci d’un air d’anxiété, bien que Randal Leslie n’ait certainement que de bonnes intentions, je redoute toujours ses visites.