dulgente, si rayonnante, physionomie à laquelle s’associait invinciblement le souvenir, de potages, de gelées, de la bouteille de vieux vin dans les maladies, des bons de pain et des couvertures en hiver, de paroles consolantes, de visites affectueuses dans chaque petit malheur, de petits travaux donnés par mistress Hazeldean, soit à un bon vieillard qui n’était pas fâché de gagner encore quelques sous, soit à quelque chétif adolescent ayant grandi trop vite. Frank avait aussi sa part de la muette bénédiction des assistants. Quant à miss Jemima, ses faibles ne venaient que d’un besoin trop prononcé de s’attacher comme le lierre à un chêne vigoureux, et la tendresse naturelle à son cœur était si peu égoïste, qu’elle avait aidé plus d’une jeune fille du village à trouver un époux, grâce à l’appât d’un cadeau de noces donné sur ses économies : elle avait donc de chauds partisans surtout parmi la jeunesse. Il n’y avait pas jusqu’au gros et gras valet de pied, qui venait le dernier portant le livre du squire, qui n’eût sa part de la bienveillance générale qui rattachait le château au village. D’ailleurs, il était né et avait été élevé à Hazeldean comme les deux tiers des domestiques du squire, qui sortaient en ce moment de leur large banc situé sous la galerie.
Le squire, de son côté, était visiblement touché. Au lieu de marcher droit devant lui sans prendre garde aux saluts ni aux révérences, il baissait un peu la tête et une légère rougeur colorait ses joues. Quand il regarda autour de lui avec un certain embarras et que ses yeux rencontrèrent ces regards amis, il y répondit avec une effusion touchante et cordiale, avec un regard qui disait clairement : Je ne mérite pas tout à fait cela, je le crains, voisins. Mais je vous remercie de tout mon cœur de votre bon vouloir. Et ce regard fut si vite compris que, si la scène ne se fût passée dans l’église, il y eût eu, j’en suis sûr, un hourra quand le squire s’éloigna.
À peine M. Hazeldean était-il hors de l’église que M. Stirn lui parla à l’oreille. À mesure que son factotum parlait, la figure du squire s’allongeait et se colorait. Les fidèles qui sortaient en masse de l’église échangèrent des regards. Ce colloque de mauvais augure entre le squire et son homme d’affaires atténua fâcheusement l’effet du sermon de M. Dale. Le squire furieux frappait la terre de sa canne. « J’aurais mieux aimé apprendre que Black avait la morve ! s’écria-t-il. Un jeune gentleman, qui venait faire une visite à mon fils, battu et insulté à Hazeldean ! Un jeune gentleman… Mille diables… monsieur, c’est mon parent… Sa grand’mère était une Hazeldean. Je crois vraiment que Jemima a raison et que le monde touche à sa fin ! Mais Léonard Fairfield dans les ceps !… Que va dire le curé et après un tel sermon ! « Riches, respectez les pauvres ! » Et la veuve donc ? et le pauvre Mark qui a pour ainsi dire rendu le dernier soupir dans mes bras ? Stirn, vous avez un cœur de roc ! Misérable imbécile, ignorant ! idiot ! Mais qui diable vous a donné le droit d’emprisonner un homme ou un enfant dans ma paroisse… sans jugement… sans autorisation ? Courez délivrer l’enfant avant que personne ne le voie ; courez, ou sinon… » Le squire leva sa canne et