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« Combien je suis heureuse, disait un jour Florence, que mon choix soit tombé sur un homme qui pense comme vous pensez ! Combien vos paroles m’élèvent et m’exaltent ! et cependant il fut un temps où je ne songeais même pas à vous demander votre croyance sur ces questions. C’est dans le chagrin et la maladie que nous apprenons pourquoi la foi a été donnée aux hommes comme consolatrice ; la foi, qui est l’espérance sous un nom plus divin ; une espérance qui ne connaît ni la déception ni la mort. Ah ! que vos paroles sont pleines de sagesse, quand vous prêchez la philosophie de la foi ! C’est en effet la télescope à travers lequel les étoiles semblent grandir à nos yeux. Et je vous laisse à vous, Ernest, mon bien-aimé, à la fin compris et connu, je vous laisse, pour le moment où je ne serai plus là, cette conseillère, cette amie ; vous connaîtrez vous-même ce que vous m’avez enseigné. Et lorsque vous contemplerez non-seulement le ciel, mais l’espace infini, la création sans bornes, vous saurez que je suis là ! Car l’esprit habite partout où s’étend la présence universelle de Dieu. Qui sait à combien de phases différentes d’existences, de missions, de devoirs, de tâches actives et glorieuses nous sommes réservés dans d’autres sphères ; peut-être devons-nous les connaître ensemble et les partager ; peut-être devons-nous d’âge en âge monter plus haut dans l’échelle des êtres. Car assurément dans les cieux il ne doit y avoir ni halte ni langueur ; on ne doit pas s’y livrer à un repos calme et uniforme. Le mouvement et le progrès y resteront la loi et la condition de l’existence. Et il y aura pour nous des tâches et des devoirs à remplir là-haut, comme il y en a eu ici-bas. »

C’était dans cette doctrine, partagée par Maltravers, que le caractère de Florence, sa surabondance de vie, son activité de pensées, ses aspirations, son ambition se révélaient encore. Son regard contemplait sans trembler, moins le calme et le repos de la tombe, que la lumière et la gloire d’une existence renouvelée et progressive.

Tandis qu’ils causaient ainsi un jour, et que la voix touchante d’Ernest (tranquille, mais un peu tremblante pourtant de l’émotion qu’il cherchait à réprimer) calmait quelquefois, et quelquefois élevait encore davantage les pensées de Florence, on annonça lord Vargrave. Lumley Ferrers, qui maintenant avait hérité de ce titre, entra. C’était la première fois que Florence le voyait depuis la mort de son oncle ; la première fois que Maltravers le voyait depuis cette soirée si fatale