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adieu ; et mes dernières paroles vous condamnent au plus triste de tous les destins, aux remords qui viennent trop tard ! »

Il s’éloigna lentement ; et, au moment où la porte se refermait sur cette imposante et hautaine figure, Florence sentit que la malédiction commençait déjà à s’accomplir pour elle. Elle s’élança vers la fenêtre. Elle l’aperçut qui s’éloignait rapidement au galop de son cheval. Ah ! quand donc se reverront-ils ?


CHAPITRE IX.

Et maintenant je vis. Oh ! pourquoi faut-il que je vive encore ? J’aurais voulu mourir de cette angoisse.
(Wordsworth.)

Le soir même, il était environ neuf heures, et Maltravers se trouvait seul dans sa chambre. Sa voiture était à la porte, ses domestiques chargeaient les bagages, il allait partir pour Burleigh. Londres, la société, le monde, lui étaient devenus odieux. Son âme froissée et indignée réclamait la solitude. En ce moment Lumley Ferrers entra précipitamment.

« Vous me pardonnez mon indiscrétion, dit ce dernier, avec sa franchise habituelle, mais…

— Mais quoi, monsieur ? Je suis occupé.

— Je ne vous retiendrai qu’un instant. Maltravers, nous sommes de vieux amis. Je conserve pour vous de l’estime et de l’affection, quoique la différence de nos habitudes nous aient, dans ces derniers temps, éloignés l’un de l’autre. Je viens vous trouver de la part de ma cousine ; de Florence. Il y a eu quelque malentendu entre vous. Je suis allé la voir aujourd’hui, après que vous étiez parti ; son chagrin m’a touché. Je viens de la quitter. Quelque mauvaise langue lui a rapporté je ne sais quel conte ; les femmes sont des créatures folles et crédules. Détrompez-la, et, sans aucun doute, tout cela s’arrangera.

— Ferrers, si un homme m’avait parlé comme l’a fait lady Florence, il aurait fallu que le sang de l’un de nous deux coulât. Et pensez-vous que je puisse pardonner, de la part de la femme que j’avais rêvée pour compagne, des paroles qui, pro-