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Staunch pour la ville de C…, après une contestation vive, dont il était sorti victorieux. Les journaux ministériels entonnèrent des chants de victoire, les journaux de l’opposition adressèrent aux électeurs de C… toutes sortes d’invectives, et déclarèrent que M. Stout, l’adversaire de lord Staunch, ferait une pétition… qu’il ne fit jamais. Au milieu de tout ce bruit, M. Lumley Ferrers se glissa tranquillement et sans être remarqué dans la représentation des Trois-Chênes.

Le soir de son élection il se rendit chez lord Saxingham ; mais ce qui arriva en cette circonstance mérite un autre chapitre.


CHAPITRE IV.

Je connais des princes du sang, des princes étrangers, des grands seigneurs, des ministres d’État, des magistrats et des philosophes qui fileraient pour l’amour de vous. En pouvez-vous demander davantage ?
(Lettres de Mme de Sévigné.)
Lindore. — Je… je crois que cela va m’étouffer. Je suis amoureux… Maintenant taisez-vous. Taisez-vous, vous dis-je.

Dalner. — Vous, amoureux ! Ah ! ah !

Lindore. — Voilà qu’il rit !

Dalner. — Non ; j’en suis vraiment fâché pour vous.

(Comédie allemande. — La Fausse délicatesse.)
Qu’est-ce ?

De l’or.

(Shakspeare.)

Il arriva que ce soir-là, Maltravers, pour la première fois, avait accepté une des nombreuses invitations dont l’honorait lord Saxingham. Le comte et Maltravers appartenaient à des partis politiques opposés, et, sous bien d’autres rapports, il y avait entre eux peu de conformité. Lord Saxingham était un homme habile dans son genre, mais mondain, cité pour tel, même parmi les plus mondains. « L’homme, a-t-on dit, est né pour marcher le front levé et regarder les étoiles. » C’est là une éloquente illusion, que lord Saxingham aurait suffi à réfuter. Il semblait né pour marcher en deux ; et s’il regardait jamais des étoiles, c’étaient celles qui brillent au ruban de l’ordre de la Jarretière. Quoiqu’il descendît d’une famille illustre