Page:Bulwer-Lytton - Ernest Maltravers.pdf/298

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chère femme, vous serez milady ; rien que ça ! N’êtes-vous pas contente ? pourquoi donc milady ne sourit-elle pas ? Où est l’enfant ? où est-elle, vous dis-je ?

— Elle est allée se coucher, dit mistress Templeton, presque avec frayeur.

— Se coucher ! Il faut que j’aille l’embrasser. Ah ! elle est allée se coucher ? Allumez cette bougie, Lumley. (Ici M. Templeton agite la sonnette.) John, dit-il, au moment où le domestique entrait, John, dites à Jacques d’aller demain de bon matin chez Baxter, pour lui commander de ne pas peindre ma voiture jusqu’à ce que je le lui fasse dire. Il faut que j’aille embrasser l’enfant. Oui, vraiment, je veux l’embrasser.

— La peste soit de l’enfant, grommela Lumley, lorsque, après avoir donné le flambeau à son oncle, il revint s’asseoir auprès du feu ; que diable a-t-elle de commun avec cette affaire ? C’est une charmante petite fille que la vôtre, madame ! Vous ne sauriez croire combien je l’aime ! Mon oncle en raffole ; cela ne m’étonne pas !

— En effet, il l’aime beaucoup, beaucoup ; et mistress Templeton poussa un soupir qui parut sortir des profondeurs de son cœur.

— L’avait-il prise en affection avant que vous fussiez mariés ?

— Oui, je le crois ; oh ! oui, certainement.

— S’il était son père, il ne pourrait l’aimer davantage. »

Mistress Templeton ne répondit rien ; elle alluma sa bougie, souhaita le bonsoir à Lumley, et se retira.

« Je voudrais bien savoir si ma grave tante et mon grave oncle n’auraient pas par hasard mordu à la pomme, avant d’avoir acheté la jouissance de l’arbre. Tout cela me paraît louche ; et pourtant, non, ce n’est pas possible ; il n’y a rien de séducteur ou de séduisant chez ce vieux bonhomme. Ce n’est pas probable ;… le voici. »

Templeton rentra ; ses yeux étaient humectés, et son front s’était éclairci.

« Et comment se porte le petit ange, monsieur ? demanda Ferrers.

— Elle m’a embrassée, quoique je l’eusse éveillée ; les enfants sont pourtant généralement maussades quand on les réveille.

— En vérité ? Pauvres chéris ! Eh bien ! monsieur, j’avais donc raison ; puis-je voir cette lettre ?