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mon économie. Pardieu ! il faut que cela finisse. Il est temps d’y songer ; avec cela que juste au moment où j’avais le plus besoin de son secours, ne voilà-t-il pas mon digne oncle qui se met en tête de se remarier ! Allons décidément j’étais trop bon pour ce monde-ci. »

Il en était là de sa rêverie lorsque soudain il se heurta violemment au contact d’un grand monsieur, qui portait très haut la tête, et ne paraissait pas s’apercevoir qu’il avait presque renversé notre philosophe distrait.

« Que diable, monsieur, qu’est-ce que cela signifie ? s’écria ce dernier.

— Je vous demande mille par… commençait à dire l’autre avec douceur, lorsque l’offensé lui saisit le bras et s’écria :

— Est-il possible, monsieur, est-ce bien vous que je vois ?

— Ah !… Lumley ?

— Lui-même ; et comment cela va-t-il, mon cher oncle ? Je ne savais pas que vous fussiez à Londres. Je n’y suis arrivé moi-même que d’hier au soir. Que vous avez donc bonne mine !

— Mais oui, grâce au ciel, je me porte assez bien.

— Et vous êtes heureux dans vos nouveaux liens ? Il faut me présenter à mistress Templeton.

— Hum ! fit M. Templeton, en s’éclaircissant la voix, et en souriant d’un air embarrassé, je n’aurais jamais pensé que je dusse me remarier.

— L’homme propose et Dieu dispose, dit Lumley Ferrers, car c’était lui.

— Tout doux, mon cher neveu, répondit M. Templeton, avec gravité ; de telles phrases sont tant soit peu sacriléges ; j’ai des idées arriérées à ce sujet, vous le savez.

— Je vous fais mille excuses.

— Une seule excuse suffira. Toutes ces hyperboles sont autant de péchés.

— Maudit cagot ! pensait Ferrers ; néanmoins, il s’inclina avec respect.

— Mon cher oncle, j’ai eu une jeunesse bien folle ; mais la réflexion vient avec les années ; aidé de vos conseils, si vous voulez bien me permettre cette espérance, je compte devenir meilleur et plus sage.

— C’est bien, Lumley, répondit l’oncle ; je suis de mon côté bien aise de vous voir revenir dans votre pays. Voulez-vous dîner avec moi demain ? Je demeure près de Fulham. Vous