— Ha !… Vous mentez !…
— Sur mon honneur, je vous dis la vérité ; j’en ai appris la nouvelle hier au soir. Ils vous ont suivi jusqu’à L… ils vous ont traqué au dehors de la ville : un mot de moi vous aurait livré entre leurs mains. Je n’ai rien dit ; vous êtes en sûreté ; vous pouvez encore échapper à leurs poursuites. Je vous aiderai même à fuir ce pays, et à attendre le terme naturel de votre existence en sécurité et en paix.
— Vous ne disiez pas cela l’autre jour, dans le joli petit salon de là-bas ; vous voyez que c’est moi qui ai l’avantage maintenant ; avouez-le.
— Je l’avoue, dit le banquier. »
Darvil ricana et se frotta les mains.
L’homme d’opulence recommença à sentir son importance, et continua.
« Voilà un des côtés de la question. De l’autre côté, supposons que vous me voliez mon argent, et que vous m’assassiniez ; pensez-vous que ma mort diminuera l’ardeur de la poursuite dont vous êtes l’objet ? Tout le pays sera en armes, et avant quarante-huit heures d’ici vous serez traqué comme un chien enragé. »
Darvil garda le silence, comme s’il réfléchissait ; au bout de quelques instants il répondit :
« Eh ! bien, vous êtes un finaud, après tout. Qu’avez-vous sur vous ? Vous savez que vous m’avez fait le marché bien dur l’autre jour ; maintenant c’est moi qui fais le marché. La bure est en hausse ; le drap est en baisse.
— Tout ce que j’ai sur moi vous appartiendra, dit le banquier avec empressement.
— Donnez, alors.
— Voilà ! dit le banquier, en remettant sa bourse et son portefeuille entre les mains de Darvil.
— Et la montre ?
— La montre ?… Allons, la voici !
— Qu’est-ce que cela ? »
Les sens du banquier étaient aiguisés par la peur ; mais son ouïe n’était pas encore si fine que celle de Darvil ; il n’entendait rien, hormis la pluie dans les feuilles, et le murmure de l’eau dans le fossé voisin. Darvil se pencha pour écouter ; puis il se releva, respira longuement, et dit :
« Je crois qu’il y a des rats dans la meule ; ils vont courir sur moi pendant que je dormirai ; mais ce sont de petits êtres