Page:Bulwer-Lytton - Ernest Maltravers.pdf/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cette lande ! J’ai besoin d’argent, moi, et je ne veux pas travailler… du moins tant que je peux faire autrement. »

Pendant qu’il délibérait ainsi, il lui sembla que l’atmosphère de la chambre était étouffante ; il ouvrit la fenêtre, et se pencha au dehors ; une pluie battante lui fouetta le visage. Il ferma la fenêtre avec une imprécation ; il ôta ses souliers, s’achemina doucement vers le seuil de sa chambre, et à la lueur de la chandelle qu’il abritait avec sa main il examina la porte qui se trouvait vis-à-vis. Elle était close. Il se pencha et tendit l’oreille avec inquiétude.

« Tout est tranquille, pensa-t-il ; peut-être dort-il déjà. Je vais descendre tout doucement. Si seulement Jack Walters venait ce soir, la chose irait à ravir. »

Il descendit, à pas de loup, les degrés. Dans un coin au pied de l’escalier se trouvaient rassemblés divers objets, des fagots, et un couperet. Il saisit le couperet.

« Bon ! se dit-il ; et puis nous avons un marteau d’enclume quelque part pour Walters. »

Il s’appuya contre la porte et appliqua son œil à une fente qui lui permettait de voir indistinctement l’intérieur de la chambre, éclairée par la lueur vacillante du feu.


CHAPITRE II.

Qu’est-ce que cela ?
Une charogne.

(Shakspeare. Le Marchand de Venise, acte II, scène vii.)

C’est vers ce moment que l’étranger jugea à propos de commencer sa retraite. Le bruit de voix indistinct et étouffé, qu’il avait d’abord entendu au-dessus de lui, pendant la conversation du père et de la fille, avait cessé. Ce silence l’encourageait, et le mettait en même temps sur ses gardes. Il s’approcha de la porte d’entrée, tira doucement le verrou, et trouva la porte fermée à double tour, et la clef absente. Il n’avait pas observé que, pendant son repas, avant que ses soupçons eussent été éveillés, son hôte, en refermant la porte, avait emporté la clef. Ses craintes se trouvaient maintenant confir-