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Je pensai ensuite à ce vieux soldat grisonnant, au regard d’aigle, avec sa tour en ruine et ses terres stériles ; je vis devant moi son enfance fière, chevaleresque, pleine de préjugés, glissant à travers les débris du castel ou se courbant sur l’arbre généalogique tout moisi. Et ce fils, pour quelle noire offense était-il renié ? La terreur s’emparait de moi. Et cette fille, sa chère brebis, son tout, était-elle belle ? Avait-elle des yeux bleus comme ma mère, ou un grand nez romain et des sourcils épais comme le capitaine Roland ? Et je rêvai, je rêvai, je rêvai… et la bougie s’éteignit… et le clair de lune devint plus brillant et plus calme, jusqu’à ce qu’enfin, voyageant en ballon avec l’oncle Jack, je vins à tomber dans la mer Rouge… sur quoi la voix bien connue de la bonne Primmins me rappela à la vie, en criant :

« Bonté divine ! l’enfant ne s’est pas mis au lit de toute cette éternelle nuit ! »


CHAPITRE IV.

Je me hâtai de descendre aussitôt que je fus habillé, parce que je voulais revoir mes endroits favoris : le petit bout de jardin où j’avais semé des anémones et du cresson, la promenade le long du mûr tapissé de pêchers, le bassin où j’avais pris à l’hameçon des goujons et des perches.

En arrivant dans le vestibule, j’aperçus mon oncle Roland dans une position très-difficile. La servante lavait avec une brosse les dalles du corridor ; elle était grasse, et il est étonnant combien une femme grasse paraît plus grasse encore à quatre pattes ! Je disais donc que la servante lavait les dalles, le dos tourné au capitaine, qui méditait évidemment une sortie et regardait l’obstacle qu’il avait devant lui, en toussant d’une manière très-intelligible : hélas ! la servante était sourde. Je m’arrêtai, curieux de voir comment l’oncle Roland se tirerait de ce dilemme.

Trouvant ses hem ! inutiles, mon oncle se fit aussi mince