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Roses, comme dit votre père, il y a une grande lacune ; on ne rencontre plus qu’un ou deux noms, sans dates ni mention de mariages, jusqu’au temps d’Henri VII, si ce n’est qu’un William Caxton est nommé dans un acte sous seing privé daté du règne d’Édouard IV. Or, il y avait dans l’église du village un superbe monument de bronze érigé en mémoire d’un sir William de Caxton qui avait été tué à la bataille de Bosworth, en combattant pour le méchant Richard III. Vers le même temps vivait, comme vous savez, le grand imprimeur William Caxton. Eh bien, votre père, se trouvant dans la capitale, en visite chez sa tante, s’occupa de parcourir tous les vieux papiers qu’il put trouver au collège héraldique ; et il fut transporté de joie en se convainquant qu’il descendait, non de ce pauvre sir William qui avait été tué pour la défense d’une si mauvaise cause, mais du grand imprimeur, issu lui-même d’une branche cadette de cette famille, et aux descendants duquel ces biens étaient échus sous le règne d’Henri VIII. Ce fut à ce sujet que votre oncle Roland se brouilla avec lui, et je redoute vraiment de les voir retomber de nouveau sur la même question.

— Alors, chère maman, à ne consulter que le sens commun, je dois dire que mon oncle a tort ; pourtant, cela se comprend encore. Mais ce ne fut certainement pas la seule cause de discorde ? »

Ma mère baissa les yeux et passa doucement une de ses mains sur l’autre, comme c’était son habitude lorsqu’elle était embarrassée.

« Qu’y avait-il encore, bonne petite mère ? demandai-je d’un ton câlin.

— Je crois, c’est-à-dire je… je suppose qu’ils aimèrent tous deux la même jeune dame.

— Comment ! vous ne voulez pas dire que mon père ait jamais été amoureux d’une autre que vous ?

— Si, si, sérieusement, Sisty… Et même, ajouta ma mère, après un instant de silence, en poussant un soupir que j’entendis à peine, il n’a jamais été amoureux de moi ; et qui plus est, il a eu la franchise de me le dire.

— Et pourtant vous…

— Je l’épousai… oui ! dit ma mère en levant au ciel les yeux les plus doux et les plus purs où jamais amant ait pu