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CHAPITRE XI.

Deux semaines se sont écoulées depuis la date du chapitre précédent ; nous avons dormi notre dernier sommeil, pour dix ans, sur le sol de l’Angleterre. Vivian a obtenu une entrevue avec son père. Voilà une heure et plus qu’ils sont ensemble. Ni mon père ni moi nous ne voulons les troubler. Mais l’horloge sonne ; il est tard ; le navire met à la voile cette nuit ; nous devrions être à bord. Nous attendons en bas de l’escalier ; la porte de la chambre s’ouvre, et un pas pesant descend les degrés ; le père s’appuie sur le bras de son fils. Il faudrait voir avec quelle timidité le fils guide ce pas boiteux. Maintenant que la lumière éclaire leurs visages, il y a des larmes sur la joue de Vivian ; mais la figure de Roland paraît calme et heureuse. Heureuse, lorsqu’il va se séparer de son fils, peut-être pour toujours ? Oui, heureuse, parce qu’il a trouvé un fils ; et il ne pense ni aux années, ni à l’absence, ni aux chances de mort ; il est reconnaissant envers la miséricorde divine et nourrit une espérance céleste. Si vous êtes surpris de voir Roland heureux en ce moment, c’est bien vainement que j’ai essayé de le faire respirer, vivre et agir devant vous !

Nous sommes à bord, où nos bagages nous ont précédés. Avec l’aide d’un charpentier, j’ai établi dans la cale des cabines pour Vivian, Guy Bolding et moi-même. Car, pensant que nous ne pouvions trop tôt mettre de côté les idées européennes, nous dégentilhommiser, comme disait Trévanion, nous n’avions retenu que des logements de matelots, au grand avantage de nos finances. Nous avions aussi l’avantage d’être entre nous, en compagnie de tous nos Cumberlandais, à la fois nos amis et nos serviteurs.

Nous sommes tous à bord ; nous avons vu pour la dernière fois ceux que nous quittons, et nous sommes tous debout sur le pont, bras dessus bras dessous. Nous sommes à bord, et nous