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plorer son silence. Il s’étendit alors avec amertume sur la haine de son père contre lui, et sur la résolution qu’il avait prise de lui prouver, par la position qu’il se créerait seul dans le monde, combien cette haine était injuste. Son père le croyait mort. Peut-être en était-il content. Il ne voulait lui ôter cette croyance qu’après avoir racheté les erreurs de son enfance et forcé sa famille à être fière de lui.

Quoique lady Ellinor eût peine à admettre que Roland pût haïr son fils, elle pouvait le croire sévère et irritable, imbu qu’il était des idées du soldat relativement à la discipline. L’histoire du jeune homme la toucha, sa résolution lui plut. Toujours un peu romanesque, sympathisant toujours avec les ambitieux, elle entra dans les vues de Vivian avec une ardeur dont il fut étonné. Elle était ravie de conduire le fils à la fortune pour le réconcilier plus tard avec le père : ce serait une sorte d’expiation de tout ce que Roland croyait avoir à lui reprocher.

Elle voulut révéler ce secret à Trévanion, pour qui elle n’avait rien de caché. C’était d’ailleurs s’assurer qu’il le garderait.

Ici je suis forcé de m’écarter un peu de l’ordre chronologique de mon récit, pour apprendre au lecteur que, lors de l’entrevue de lady Ellinor avec Roland, la rudesse des manières de mon oncle l’avait empêchée de lui confier le secret de Vivian. Mais à la première tentative qu’elle fit pour le sonder, elle avait commencé par quelques paroles d’éloge du nouvel ami de Trévanion, et cela avait éveillé les soupçons de Roland ; Ce furent ces soupçons sur l’identité de ce M. Gower avec son fils qui l’intéressèrent si vivement à la délivrance de Mlle Trévanion. Mais le pauvre soldat cherchait si héroïquement à résister à ses propres craintes, qu’il ne voulut me faire aucune question, de peur que mes réponses ne paralysassent l’énergie dont il avait si grand besoin. « Car, dit-il ensuite à mon père, je sentais le sang se précipiter à mes tempes. Si j’avais dit à Pisistrate : « Décrivez-moi cet homme ; » si cette description m’avait fait reconnaître mon fils, et si j’avais craint de ne pas arriver à temps pour empêcher l’accomplissement de son crime, ma tête n’aurait pu y résister. Aussi je n’osai lui faire aucune question. »

Je reprends le fil de mon récit. À dater du jour où Vivian