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que j’ai contribué à faire connaître à Trévanion… Vivian, Vivian !

— Vivian ! ah ! ce jeune homme dont je vous ai entendu parler. Mais comment ?… une perfidie contre qui… contre Trévanion ?

— Vous me torturez avec vos questions. Écoutez… Ce Vivian, je le connais… il a introduit dans la maison, en qualité de domestique, un agent capable de tout. Ce domestique lui a servi à gagner la soubrette de Fanny… de Mlle Trévanion. Mlle Trévanion est une héritière, Vivian un aventurier. La tête me tourne, je ne puis m’expliquer en ce moment… Ah ! je vais écrire un mot à lord Castleton… lui dire mes craintes et mes soupçons ; il nous suivra, je le sais… ou du moins il fera pour le mieux. »

J’attirai à moi l’encre et le papier, et j’écrivis précipitamment. Mon oncle s’approcha et lut par-dessus mon épaule.

Soudain il me saisit le bras en s’écriant :

« Gower, Gower ! Quel est ce nom ? Vous me disiez Vivian.

— Vivian ou Gower… c’est tout un. »

Mon oncle se précipita hors de la chambre. Il était naturel qu’il me quittât pour faire quelques brefs préparatifs de départ. Je terminai ma lettre, je la cachetai, et lorsque, cinq minutes après, la chaise arriva à notre porte, je donnai ma lettre au valet qui accompagnait les chevaux, avec ordre de la remettre sur-le-champ à lord Castleton en personne.

Mon oncle descendait alors. Il quitta le seuil de son pas le plus ferme.

« Consolez-vous, me dit-il en entrant dans la chaise où je m’étais déjà jeté. Nous nous trompons peut-être !

— Nous nous trompons ! Vous ne connaissez pas ce jeune homme. Il a toutes les qualités qui peuvent séduire une fille comme Fanny ; et il n’a pas, je le crains, le moindre sentiment d’honneur capable de mettre obstacle à son ambition. Je le juge à présent comme par une révélation… et trop tard… ô Dieu ! s’il était trop tard ! »

Un gémissement s’échappa des lèvres de Roland. J’y crus voir une preuve de la sympathie que lui inspirait mon émotion, et je saisis sa main… elle était froide comme celle d’un mort.