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— Votre bonne amie ! m’écriai-je très-soulagé, parce que je trouvais l’explication assez naturelle. Pourtant, ajoutai-je d’un air soupçonneux, s’il en est ainsi, pourquoi demandait-elle une lettre de M. Gower ?

— Vous avez l’oreille fine, monsieur ; mais quoique

…Tout amour et toute obéissance,
Douceur, humilité, patience, impatience,

la jeune femme ne veut pas épouser un domestique en livrée, la fière créature qu’elle est ! de sorte que M. Gower, sachant ce qui en est et s’intéressant à mon amour, lui dit, s’il m’est permis de citer encore le Cygne :

À côté de Johnson tu peux dormir tranquille.

Bref, il me promit une place dans l’administration du timbre ; mais la petite sotte voulait une promesse écrite… comme si M. Gower pouvait lui écrire !… Et maintenant, monsieur, continua M. Peacock avec une gravité plus simple, vous êtes libre, sans doute, de dire à milady tout ce qu’il vous plaira ; mais j’espère que vous ne voudrez pas m’ôter le pain de la bouche parce que je porte une livrée et que j’ai la sottise d’être amoureux d’une soubrette, lorsque j’aurais pu, monsieur, épouser des dames qui ont joué les premiers rôles dans la vie… sur les scènes de la métropole. »

Je n’avais rien à objecter à ces explications ; elles semblaient plausibles ; et, quoique d’abord j’eusse soupçonné mon homme de n’avoir recours à ces citations bouffonnes que pour se donner le temps d’inventer une histoire, ou pour détourner mon attention de ce qu’il y avait de peu probable dans son récit, pourtant à la fin, comme ce qu’il disait paraissait assez vraisemblable, je me sentis disposé à croire que cette bouffonnerie de citations était un des traits de son caractère. Je me contentai de lui demander :

« D’où venez-vous à présent ?

— De chez M. Trévanion, qui est à la campagne et qui m’a remis des lettres pour lady Ellinor.

— Ah !… et cette jeune femme savait que vous deviez arriver à Londres aujourd’hui ?

— Oui, monsieur ; M. Trévanion m’avait annoncé, il y a quelque temps, que je partirais tel jour.