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alors que votre fils cadet est le missionnaire des coureurs d’aventures.

— Pisistrate, dit mon père, vous raisonnez par synecdoque, éloquemment, mais illogiquement. »

Puis, décidé à ne pas en entendre davantage, mon père se leva et se retira dans son cabinet.

Mais son observation, que je venais d’éveiller, commença dès ce jour à étudier mes goûts et mon caractère ; il devint silencieux et rêveur, et finalement eut de longues conférences avec Roland. Il en résulta qu’un soir de printemps, pendant que j’étais nonchalamment couché au milieu des herbes et des fougères qui croissaient entre ces tristes ruines, je sentis une main sur mon épaule, et mon père, s’asseyant à côté de moi sur un fragment de pierre, me dit gravement :

« Pisistrate, causons. J’avais espéré mieux de votre étude de Robert Hall.

— Oh ! cher père, le remède m’a fait grand bien. Je n’ai plus murmuré depuis, et je regarde la vie d’un œil intrépide et joyeux. Mais Robert Hall a rempli sa mission, et je voudrais remplir la mienne.

— N’est-il aucune mission à remplir dans ton pays natal, ô esprit planéticost et exalloriote[1] ? demanda mon père d’un ton d’affectueux reproche.

— Hélas ! si. Mais l’instinct de la vocation est pour les esprits médiocres ce qu’est l’impulsion du génie pour les grands esprits. Il y a dans chaque homme une boussole ; dans la chose que l’homme ferait le mieux, il y a un aimant.

— Papæ ! dit mon père en ouvrant de grands yeux ; et ne peut-on vous trouver d’aimant plus rapproché que la grande terre d’Australie ?

— Ah ! père, si vous avez recours à l’ironie, je ne dirai plus rien. »

Mon père me regarda tendrement pendant que je baissais la tête, triste et confus.

« Mon fils, dit-il, pensez-vous que je sois vraiment d’humeur à plaisanter, lorsqu’il s’agit de savoir si vous mettrez entre nous de vastes mers et de longues années ? »

  1. Mots forgés du grec par M. Caxton, de πλανητικός, errant, et ἐξαλλοτριόω, j’exporte.