bourse et finissant peut-être par une place de fellow, prime offerte au célibat, ainsi que vous le désirez, ô économiste malthusien ! examinez quelle espèce de chose cela est[1].
Trois années de livres sur livres, trois années durant lesquelles on a devant soi une grande mer morte ; et les pommes que produisent ses rivages sont toutes remplies de cendres de cicéro et de petit-romain ! Ces trois années passées, peut-être a-t-on gagné le grade de fellow ; toujours livres sur livres ! si le monde entier ne finit pas aux portes du collège… Si, au sortir de l’université, je veux me lancer dans la littérature, devenir auteur de profession ; livres sur livres ! Si j’entre dans le barreau : livres sur livres ! Ars longa, vita brevis ; cela signifie que c’est une longue affaire de se frayer un chemin jusqu’au brevet ! Si je me fais médecin, comment tuer le temps, sinon avec des livres, jusqu’à ce que, vers mes quarante ans, j’aie enfin la chance de tuer autre chose ? L’Église… j’avoue d’abord que je ne me sens pas assez de vertu pour cette carrière ; mais c’est la vie des livres par excellence soit que je parcoure, inglorieux et pauvre, toute la série des théologiens et des Pères ; soit que, ambitieux d’évêchés, je corrige les corruptions, non pas du cœur humain, mais d’un texte grec, pour arriver à l’épiscopat à travers les défilés des scoliastes et des commentateurs. Bref, excepté la noble profession des armes (qui, après tout, vous le savez, n’est pas précisément le chemin de la fortune), pouvez-vous m’indiquer un moyen d’échapper à ces éternels livres, à cette sonnerie de l’âme, à cette léthargie du corps ? Où trouver une issue pour cette ardeur de vivre qui parcourt tumultueusement mes veines ? Où cette large poitrine et ces membres robustes trouveront-ils leur prix, dans cette serre chaude qui produit des fièvres cérébrales et des indigestions d’intelligence ? Je sais ce qu’il y a en moi ; je sais que j’ai les qualités qui doivent accompagner des membres robustes et une large poitrine ; j’ai quelque bon sens, assez de promptitude et de pénétration ; j’aime l’émotion des dangers ; je suis de force à supporter la douleur, et je bénis Bien de m’avoir donné ces qualités parce, qu’elles sont bonnes et utiles dans la
- ↑ En se mariant, on perd tous les émoluments appartenant au titre de fellow, ou agrégé de l’université.