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la vie est immense devant nous, tant que nous conservons nos parents ! Combien elle est riche en espérances ! Que de motifs de vaincre nos chagrins, pour qu’ils ne les partagent pas avec nous !


CHAPITRE III.

J’entrai dans le cabinet de Trévanion. À cette heure on le trouvait rarement à la maison ; mais je n’y avais pas pensé, et je vis sans surprise que, contrairement à son habitude, il était dans son fauteuil, à lire un de ses classiques favoris, au lieu d’être à quelque comité de la chambre des communes.

« Vous êtes un charmant garçon, dit-il en me regardant, de me laisser comme cela toute la matinée, sans rime ni raison. Et mon comité est remis, parce que le président est malade ; les gens sujets à être malades ne devraient pas entrer à la chambre des communes. De sorte que me voilà à lire Properce. Parr a raison ; il n’est pas aussi élégant que Tibulle… Mais que diable avez-vous ? pourquoi ne vous asseyez-vous pas ?… Humph ! vous avez l’air bien sérieux ; vous avez quelque chose à me dire… Dites-le. »

Et laissant là Properce, le regard perçant et pénétrant de Trévanion devint aussitôt sérieux et attentif.

« Mon cher monsieur Trévanion, dis-je avec toute la fermeté que je pus réunir, vous avez été très-bon pour moi ; et, en dehors de ma famille, il n’y a pas d’homme que j’aime et respecte plus que vous. »

Trévanion. Humph ! qu’est-ce que tout cela ? (À demi-voix : ) Voudrait-il me mettre dedans ?

Pisistrate. Ainsi ne me croyez pas ingrat lorsque je vous dis que je viens résigner mes fonctions… quitter la maison où j’ai été si heureux.

Trévanion. Quitter la maison ! Bah ! je vous aurai surchargé de besogne. Je serai plus miséricordieux à l’avenir. Vous devez pardonner à un économiste. C’est le défaut de ceux de ma secte, de regarder les hommes comme des machines.