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travail ne manque jamais à ceux qui le cherchent sérieusement. On m’a raconté d’un homme fameux pour sa fidélité à sa parole que, lorsqu’il vous avait promis un gland, il en eût fait chercher un jusqu’en Norvège, si les chênes d’Angleterre n’en avaient pas produit. Si je manquais de travail, je me mettrais en route pour le Nouveau Monde, supposé que l’ancien n’en eût pas pour moi. Mais au fait ! j’ai trouvé pour vous quelque chose qui ne blessera pas, je pense, votre susceptibilité, et qui peut vous ouvrir la voie d’une indépendante honorable. Je ne puis vous expliquer cela convenablement dans la rue. Où irons-nous ?

L’étranger, après quelque hésitation. J’ai pris d’ici un logement où je puis vous conduire sans rougir… Je veux dire qu’il n’y a là ni fripons ni vagabonds.

Pisistrate, prenant avec satisfaction le bras de l’étranger. Eh bien, allons.

Pisistrate et l’étranger traversent le pont de Waterloo, et s’arrêtent devant une petite maison d’apparence respectable. L’étranger entre le premier, grâce à un passe-partout, précède Pisistrate jusqu’au troisième étage, allume une chandelle, et fait les honneurs d’une petite chambre propre et bien rangée. Pisistrate explique le travail qu’il y a à faire, et ouvre le manuscrit. L’étranger approche résolûment sa chaise de la lumière et parcourt rapidement les pages. Pisistrate tremble en le voyant s’arrêter sur une longue série de chiffres et de calculs. Sans doute cela n’est pas attrayant ; mais bah ! cela fait à peine partie du travail, qui se borne à corriger le style.

L’étranger. Il doit y avoir là une erreur… Attendez !… je vois.

Il retourne quelques pages, et corrige, avec une rapide précision, une erreur dans un calcul assez abstrait et compliqué.

Pisistrate, surpris. Vous paraissez bon arithméticien.

L’étranger. Ne vous avais-je pas dit que j’étais fort à tous les jeux où l’adresse se combine avec le hasard ? Pour cela il faut une tête d’arithméticien. Un fort joueur de cartes est un financier manqué. Je suis sûr que vous ne trouveriez jamais un heureux parieur aux courses ou au jeu, qui n’ait une excellente tête pour les chiffres… Ce français est assez bon ; il y a seulement, par-ci par-là, quelques locutions qui, à la ri-