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quin que je devrais l’être, ma réponse serait bien facile. Mais je préfère la différer. Adieu… à jeudi. »

L’étranger disparaît dans le labyrinthe de ruelles qui avoisinent Leicester-Square.


CHAPITRE III.

À mon retour à l’hôtel, je trouvai mon oncle paisiblement endormi. Après une visite que fit le chirurgien dans la matinée, et où il nous assura que la fièvre se calmait et qu’il n’y avait plus rien à craindre, je crus devoir aller expliquer à M. Trévanion le motif de mon absence pendant cette nuit. Mais la famille n’était pas revenue de la campagne. Trévanion arriva seul pour quelques heures dans l’après-midi, et parut très-affecté de la maladie de mon pauvre oncle. Quoique très-occupé, comme toujours, il vint avec moi à l’hôtel pour voir mon père et lui donner du courage. Roland allait de mieux en mieux, disait le médecin ; et en retournant dans Saint-James-Square, Trévanion eut l’attention de me délivrer de ses galères pour quelques jours.

Mon esprit, affranchi de toute inquiétude au sujet de Roland, se tourna vers mon nouvel ami. Ce n’avait pas été sans motif que j’avais interrogé le jeune homme sur sa connaissance de la langue française. Trévanion entretenait à l’étranger une grande correspondance dans cette langue, pour laquelle je ne pouvais lui être que de peu d’utilité. Lui-même, quoiqu’il écrivît et parlât couramment et correctement le français, n’avait pas une connaissance assez intime de la plus délicate et la plus diplomatique des langues pour satisfaire son purisme classique. Car Trévanion était un terrible peseur de mots. Son goût était le tourment de ma vie et de la sienne. Ses discours préparés, ses péroraisons, étaient les morceaux les plus finis et les plus froids qu’on pût concevoir sous le portique de marbre des stoïciens. Ils étaient si limés et si tournés, si émondés et si châtiés, qu’on n’y trouvait jamais