Page:Bulwer-Lytton - Aventures de Pisistrate Caxton.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mon ancienne connaissance se retourna.

« Policeman, reprit le jeune homme avec un sourire étrange, que croyez-vous que vaut ce logement ? je ne dis pas pour une nuit, car vous voyez que la nuit est passée, mais pour deux heures encore ; le logis est primitif, mais il me plaît ; je crois qu’un schelling serait un joli loyer, n’est-ce pas ?

— Vous aimez à plaisanter, monsieur, » dit le policeman, dont le front se dérida. Il ouvrit la main machinalement.

« Alors, va pour un schelling ; c’est marché conclu ! Mais vous me faites crédit. Bonsoir. Venez me réveiller à sir heures ! »

Sur ce, le jeune homme se recoucha si résolûment, et la figure du policeman me révéla un tel ébahissement, que j’éclatai de rire et sortis de ma cachette. Le policeman me regarda.

« Connaissez-vous ce… ce…

— Ce monsieur ? dis-je sérieusement. Oui, vous pouvez le laisser à mes soins ; » et je glissai le prix du logement dans la main du policeman.

Il jeta un coup d’œil sur le schelling d’abord, puis sur moi, puis à droite et à gauche, secoua la tête et s’éloigna. Je m’approchai alors du jeune homme, lui touchai le bras et lui dis :

« Vous souvenez-vous de moi ? Qu’avez-vous fait de M. Peacock ?

L’étranger, après une pause. Je me souviens de vous. Votre nom est Caxton.

Pisistrate. Et le vôtre ?

L’étranger. Pauvre diable, si vous interrogez mes poches — les poches sont le symbole de l’homme — Affronte-diable, si vous interrogez mon cœur. (Puis, après m’avoir examiné de la tête aux pieds :) Le monde paraît vous avoir souri, monsieur Caxton ! N’avez-vous pas honte de parler à un misérable couché sur les pierres ?… Après tout, assurément personne ne vous voit.

Pisistrate, gravement. Si j’avais vécu dans le siècle dernier, j’aurais pu trouver Samuel Johnson couché sur les pierres.

L’étranger, se levant. Vous avez troublé mon sommeil ; vous en aviez le droit, puisque vous avez payé ma place. Promenons-nous un peu ; vous n’avez rien à craindre, je ne suis pas un filou… pas encore !