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CHAPITRE III.

L’oncle Jack s’était mis en tête de loger chez nous, et ma mère eut assez de peine à lui faire comprendre qu’il ne nous restait pas de lit.

« C’est malheureux, dit-il. Je n’étais pas plutôt arrivé en ville qu’on m’accablait d’invitations ; et je les ai toutes refusées, me réservant pour vous.

— Vous êtes si bon, si aimable ! reprit ma mère ; mais vous voyez…

— Eh bien, alors il faut que je sorte pour chercher une chambre. N’en soyez pas peinés ; vous savez que cela ne m’empêchera pas de déjeuner et dîner chez vous… lorsque mes autres amis ne me retiendront pas absolument. Je serai terriblement persécuté. »

À ces mots, l’oncle Jack remit son prospectus dans sa poche et nous souhaita le bonsoir.

Onze heures avaient sonné, et ma mère s’était retirée, lorsque mon père laissa ses livres et remit ses lunettes dans leur étui. J’avais fini ma besogne et je m’étais assis devant le feu, rêvant tantôt aux yeux noisette de Fanny Trévanion, tantôt, et avec un cœur tout aussi ému, à la guerre, aux champs de bataille, aux lauriers, à la gloire. Les bras croisés sur la poitrine et la tête baissée, l’oncle Roland regardait les braises qui achevaient de se consumer dans la grille. Mon père jeta un coup d’œil autour de lui, et, après avoir examiné son frère pendant quelques instants, il lui dit presque tout bas : « Mon fils a vu les Trévanion. Ils ont gardé notre souvenir, Roland. »

Le capitaine se leva d’un bond et se mit à siffler selon son habitude lorsqu’il était très-ému.

« Et Trévanion désire nous voir. Pisistrate lui a promis de lui donner notre adresse. Faut-il qu’il la lui envoie, Roland ?