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semblaient revivre en lui. Ah ! quel romancier il eût fait si… si quoi ? s’il avait eu une aussi triste expérience des passions des hommes qu’il avait une heureuse intuition de leurs divers caractères !

Mais celui qui veut voir le rivage se refléter dans les flots doit regarder une rivière, et non l’Océan. La petite rivière réfléchit le tronc noueux, et le troupeau qui se repose sur ses bords, et le clocher du village, et le romantique paysage ; la mer ne réfléchit que les vastes contours du promontoire et les flambeaux éternels des cieux.


CHAPITRE III.

« Je parierais toute la rue des Lombards contre une orange de Chine, dit l’oncle Jack.

— Les chances sont-elles si grandes pour le succès contre l’insuccès ? Vous ne parlez sans doute pas d’après votre expérience, frère Jack, répondit mon père en se baissant pour gratter le canard sous l’oreille gauche.

— Mais Jack Tibbets n’est pas Augustin Caxton. Jack Tibbets n’est pas un savant, un génie, un prod…

— Assez ! s’écria mon père.

— Après tout, dit M. Squills, quoique je ne sois pas un flatteur, M. Tibbets n’est pas si loin de la vérité. Cette partie de votre livre où se trouve la comparaison entre les crania ou crânes des différentes races est superbe. Lawrence ou le docteur Prichard n’aurait pu faire mieux. Il ne faut pas qu’un pareil livre soit perdu pour le monde, et je suis d’accord avec M. Tibbets pour vous presser de le publier le plus tôt possible.

— Une chose est d’écrire, une autre de publier, reprit mon père d’un air irrésolu. Lorsqu’on songe à tous les grands hommes qui ont publié ; lorsqu’on songe qu’on va s’introduire audacieusement dans la compagnie d’Aristote, de Bacon, de Locke, de Herder, de tous les graves philosophes