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« Caroline, dit affectueusement mistress Merton, n’êtes-vous pas bien portante ? Depuis quelques jours vous me paraissez pâle, et moins gaie que de coutume.

— Mais si, je me porte assez bien, répondit Caroline avec un peu d’aigreur ; mais la vie est si triste ici, en ce moment ; il est bien contrariant que lady Élisabeth n’aille pas à Londres cette année.

— J’espère bien que ce sera moins triste au mois de juillet, ma chère, lorsque les courses de Knaresdean commenceront ; et puis lord Vargrave nous a promis de venir.

— Lord Vargrave vous a-t-il écrit récemment ?

— Non, ma chère.

— C’est fort singulier.

— Éveline vous parle-t-elle jamais de lui ?

— Pas souvent. » Et en disant ces mots Caroline se leva et quitta l’appartement.

C’était une journée fraîche et radieuse, à la fin du joli mois de mai ; les haies étaient couvertes de fleurs blanches ; une brise légère faisait frémir le jeune feuillage, les papillons voltigeaient çà et là, et les enfants les poursuivaient sur l’herbe, tandis qu’Éveline et Caroline (qui marchait beaucoup trop lentement pour sa compagne, car Éveline brûlait de courir) suivaient tranquillement le chemin de Burleigh.

Elles traversèrent les champs appartenant au presbytère, et un petit pont jeté en travers d’un ruisseau bruyant les Conduisit dans le bois.

« Cette petite rivière, dit Caroline, forme la limite qui sépare les terres de mon oncle de celles de M. Maltravers. Un homme aussi orgueilleux que l’est, dit-on, M. Maltravers, doit trouver fort désagréable d’avoir les terres d’un autre propriétaire aussi près de sa maison. De son salon on entendrait la détonation du fusil de mon Oncle. Néanmoins sir John prend soin de ne pas le gêner. De l’autre côté les domaines de Burleigh s’étendent à plusieurs milles de distance ; du reste, M. Maltravers est, après mon oncle, le plus grand propriétaire du comté. Il est fort étrange qu’il ne se marie point ! Tenez, vous pouvez maintenant apercevoir la maison. »

Le vieux château de Burleigh était situé dans un bas-fond, dominé par derrière par un amphithéâtre de verdure. Les antiques étangs resplendissant au soleil, et ombragés par des arbres gigantesques, augmentaient encore la calme tristesse de son aspect. L’une des façades de la maison