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« Les femmes d’un âge mûr diffèrent peu des hommes qui sont aussi dans leur maturité, elles voient ces affaires-là sous un aspect plus raisonnable, et prennent les choses tout tranquillement. » Or Éveline n’aurait pu être trois semaines, trois jours même, à Londres, sans qu’on lui apprît l’une ou l’autre de ces liaisons. Quelle excuse cela lui fournirait, dans le cas où elle chercherait un motif pour rompre avec lui ! En somme lord Vargrave était fort embarrassé, mais il ne désespérait de rien. La fortune d’Éveline lui était plus que jamais indispensable, et il était résolu d’obtenir sa main, puisque la main était l’accessoire obligé de la fortune.


CHAPITRE II

Vous serez Horace, et moi Tibulle.
(Pope.)

Lord Vargrave fut troublé dans ses méditations par l’arrivée de lord Saxingham.

« Vous êtes le bienvenu ! dit Lumley ; le bienvenu ! Vous êtes précisément l’homme que je désirais voir ! »

Lord Saxingham, qui avait peu changé depuis le jour où nous l’avons quitté dans la première partie de cet ouvrage, sauf qu’il avait pâli et maigri un peu, et que ses cheveux gris étaient devenus blancs comme la neige, lord Saxingham se jeta dans un fauteuil auprès de Lumley, et répondit :

« Vargrave, il est vraiment désagréable de nous trouver toujours ainsi sous la tutelle de nos partisans. Je ne comprends rien à ce nouveau genre de politique, à ces demi-mesures mutilées pour plaire à l’opposition, et pour fermer la bouche à cette hydre à cent têtes, qu’on nomme l’Opinion publique. Je suis sûr que tout cela finira mal.

— J’en suis convaincu, repartit lord Vargrave. Toute vigueur, toute union semblent nous avoir quittés ; et s’ils réussissent malgré nos efforts à faire triompher la question de ***, je ne sais pas ce qu’il nous faudra faire.

— Pour ma part, je donnerai ma démission, dit lord