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l’ombrie

ment. Son père, Bernardone, gros marchand fort riche, voyageait à travers l’Europe pour vendre et acheter des soieries. Bernardone prenait un vaniteux plaisir aux prodigalités de François. Et François lui fournissait ce plaisir en abondance. Outre qu’il était l’un des garçons les mieux vêtus d’Assise, il était le plus dissipé, menant ses camarades en bruyantes expéditions nocturnes, donnant des festins, et faisant mainte action déréglée. Aussi, il avait un énorme orgueil : « Je serai un grand prince », déclarait-il volontiers.

Assise et Pérouse étant en guerre, il fut pris et demeura un an captif. Il ne perdit là ni sa gaieté ni ses espoirs. Lorsque ses compagnons de misère se décourageaient, il leur promettait mille dédommagements. Et quant à lui, il disait : « Vous verrez qu’un jour le monde entier m’adorera. »

Rendu à sa ville natale, et voulant effacer le souvenir de cette année perdue pour le plaisir, il se divertit avec tant de violence que bientôt il s’alita, et crut mourir. Peut-être fut ce le début de ce mal de poitrine qui devait l’emporter.

Longtemps, il reste si faible qu’il ne peut marcher sans bâtons. Dans cette convalescence pénible, la couleur du monde commence de changer à ses yeux. Nous autres, qui n’avons plus la foi, la maladie nous paraît une irritante injustice et ne nous perfectionne pas. Pour les gens du passé, elle était un avertissement paternel et une punition méritée. Ils la toléraient mieux, et en sortaient plus sages et plus purs. Ainsi arriva-t-il de François,