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en hollande


la préfère à toutes les autres, et qu’elle peut tout ! En effet, elle a pu rendre la figure trop bien lissée du jeune homme, délicate comme un bijou, et précieux le fade mur gris. Elle a donné un mystère amoureux au banal tableautin.

Et voici Van der Helst, avec son bleu de porcelaine, froid, luisant, mince, craquant, antipathique, mais irrésistible. On le subit, il s’impose, avec la force des choses chèrement aimées. Qu’on essaye de regarder l’un après l’autre ces membres de la compagnie que commande le capitaine Raephorst, à chaque minute les yeux sont ramenés au centre du tableau, où se tient l’excellent capitaine avec sa grande bannière bleue. On est contraint de mêler ce bleu à tous les autres tons, d’y revenir, de le consulter, de l’entendre, de lui céder. Il dispose de vous.

Dans la Jeune malade, l’œuvre la plus délicate de Steen, ce subtil peintre de scènes grossières, le bleu intervient encore pour accentuer le charme de la jolie dame. Il est posé discrètement sur la pantoufle qui s’avance avec mollesse, et communique une élégance adorable à toute la languide personne. Du bleu encore à l’étroit ruban qui attache la manche sur le bras frais et nu. Puis une touche sur le peloton glissé à terre et dont le fil, en se déroulant, est tombé dans les braises du chauffe–pieds. On voit à peine d’abord le mince fil de soie ; pourtant, il achève la grâce du tableau. Ces légères notes de bleu ont l’émouvante force d’une tendresse secrète.