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nuremberg

sculptées, qui pendent aux murs en mémoire des nobles défunts ; et les anges de bois si gentils, agenouillés sur d’étroites traverses autour du chœur, et les ferronneries splendides. Les Allemands ont eu — et je résume qu’ils l’ont encore — un goût de dompter le fer. Certes, les grilles de Tolède et de Grenade sont merveilleuses, mais d’un travail différent et plus mince. La rude besogne du marteau frappant l’épaisse barre de métal rouge, lui imposant des formes grasses et souples, cet effort où l’ouvrier éprouve son énergie musculaire, c’est un art et un plaisir plus particulier aux races germaniques. Les ferronneries allemandes ont un caractère spécial d’énergie ; même légères d’arabesques, elles restent massives et d’une fermeté qui les fait reconnaître.

Après les églises, il faut revoir la maison de Dürer toute brune, si bien faite pour le travail et où la lumière rare donne aux pièces un air de recueillement.

Dans le plafond de la chambre qui servait d’atelier au patient et profond artiste, il y a une trappe. La légende veut que cette trappe soit une invention de Mme  Dürer qui, par là, sans peine ni fatigue, surveillait son mari, le gourmandant avec rudesse et force criailleries lorsqu’elle le surprenait à flâner. Cette dame acariâtre était aussi très rapace, et entendait que Dürer travaillât sans relâche afin de gagner beaucoup. Pauvre Dürer ! Quelqu’un m’a raconté, je ne sais si c’est exact, que les injures tombant sur lui par la détestable trappe agitaient