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un voyage

d’Adam Kraft, ont certes de l’expression, quel médiocre métier pourtant, quelle lourdeur ! Au xvie siècle, les sculpteurs allemands copient à leur grosse manière les Italiens. Plus tard, les Français. Et puis — et avec tant d’application ! — Canova. Sans doute une loi secrète s’oppose à ce que la terre qui produit Bach, Beethoven, Wagner et Kant, produise aussi Donatello et Bernin.

Après les Walkyries de Schwanthaler et les Victoires de Rauch qui ne leur cèdent sur aucun point, je tente de regarder les bustes des grands Allemands dont la Walhalla abrite la gloire. Tous les Gœthe, les Schiller, les Herder, les Lessing qu’on peut souhaiter, l’impératrice Catherine même, personne ne manque. Comment a-t-on fait pour réunir pareil nombre de mauvais bustes ? Comment ne s’en est-il pas glissé par erreur un bon, un médiocre même ? Que de soins suppose la réussite intégrale d’une telle collection ? C’est à n’y pas croire.

Je m’arrache vite à la contemplation de ces visages inspirés, solennels, et propres à rendre un saint grognon. Je vais regarder le paysage. Un très beau paysage… Oui mais d’une mélancolie qui déprime. Un paysage sans appels secrets, sans promesses. On n’a aucune envie de pénétrer dans ces grands bois, de descendre au bord de ce fleuve. Le temple grec dénature ce morceau de terre allemande…