Page:Bulteau - Un voyage.pdf/337

Cette page a été validée par deux contributeurs.
322
un voyage

Probablement la belle Aurore espérait qu’après sa visite, Vénus aurait à dire quelque chose. Comme il serait curieux de connaître les pensées que roulait dans sa tête la descendante des chauds batailleurs tandis qu’elle s’en allait vers le héros glacé…

Elle arrive, demande à voir le roi de Suède, il refuse tout net. Elle ne se décourage pas, attend, et un jour le rencontre sur un chemin venant vers elle. Aussitôt elle descend de carrosse et s’avance. Quel respectueux et tendre sourire sur les lèvres de l’adorable Aurore, on l’imagine ! Quelle émotion dans son cœur, peut-être ! Charles l’aperçoit, fait volter son cheval, part au galop, la laissant là. Elle ne se déconcerte ; ni ne s’afflige : « Je suis bien malheureuse, dit-elle, d’être la seule personne au monde à qui ce grand prince ait tourné le dos. » Puis toute consolée par ce mot, elle repart se mêler d’autres choses.

Voltaire assure avec sa gentille flatterie que Charles XII craignit la séduction. Je n’en crois rien du tout, mais plutôt qu’il avait horreur des dames politiques, cet homme qui n’aimait point à perdre le temps.

Au milieu de ses expéditions, des exercices propres à amener un peu d’argent dans ses poches vides, de ses intrigues pour se faire nommer abbesse, Aurore s’occupe de son fils. Elle ne l’a pas gardé près d’elle. Il commence de voyager lui aussi, dès qu’il a six mois. Mais elle s’informe — et le plus