Page:Bulteau - Un voyage.pdf/237

Cette page a été validée par deux contributeurs.
222
un voyage

quer sa confiance. Suivant ce principe, pour enseigner la géométrie à son fils, il s’installait devant une table et, avec des épingles mises bout à bout, construisait les figures sous le nez de l’enfant, pour qui, grâce à cette géniale méthode, elles devaient prendre aussitôt le caractère de la plus flagrante réalité.

Il arriva un jour que ce père subtil, voulant faire briller la science de son rejeton, afin d’éblouir une visiteuse, demanda soudain au petit : « Qu’est-ce qu’un triangle ? » Nulle réponse. Nouvelle question, menaçante cette fois. Alors étranglé de peur et de larmes, le moutard répondit : « Un triangle… un triangle… c’est des épingles ! » Peut–être si ce brave homme n’avait pas tant aimé qu’on touchât du doigt, qu’on vît avec les yeux de son corps, l’enfant aurait–il pu dire ce qu’est un triangle.

Les petits Allemands qui jouent près du bassin des contes, ont l’imagination abondante et la grande faculté rêveuse de leur race, Dieu merci ! Autrement, si on leur demandait : qu’est-ce que la reine des neiges ? peut-être répondraient-ils : « C’est une dame en pierre. »

Cela n’arrivera pas ! Et pour nous, qui avons tant cheminé, ce parc de la féerie a un charme pénétrant et mélancolique, car ce ne sont pas des statues que nous y regardons, mais nos anciens rêves…

Comme la ville, le musée de Berlin a pris une autre physionomie. Il est changé, de place, d’aspect, d’intention presque.