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la wartbourg

de sympathie humaine, la gaieté qui tonifie les vouloirs, et malgré sa violence, l’instinct prudent qui fait réussir. Plus habile que Wicleff, ce réaliste n’a en rien le tempérament de martyr de Jean Huss. Il n’est pas d’une pièce. Abondamment pourvu du don de colère — une colère que l’obstacle magnifie et qui crée autant qu’elle détruit – on lui trouve aussi le don de pitié. Il est grossier et très subtil. Mélanchton l’aimait ; tous ceux qui venaient auprès de son cœur, l’ont aimé. — On sait la tendresse de sa femme qu’il appelait : « ma chère côte ». — Par-dessus tout, il a l’autorité ; et, cette force absolue sans limites ni contrôle, il l’emploie magnifiquement à mettre en question une fois pour toutes, le principe d’autorité… Enfin, il est un artiste : « Je ne considère pas comme un instituteur celui qui ne sait pas chanter », dit-il. Parole profonde et d’une douceur infinie. Il chérissait la musique… Elle aussi est une libératrice…

Bon Luther, plein de chansons et d’injures, il habite — malgré eux — dans la pensée de beaucoup d’êtres qui adorent le mystère avec d’autres mots que les siens, et de beaucoup d’êtres qui croient ne rien adorer. Nous retrouvons sa voix faite de tant de voix, son cœur où aboutissaient tant de cœurs chaque fois que nous nous efforçons vers plus de réalité, plus d’espace ! Michelet a dit et bien dit : « C’est la forte main du grand Luther qui dans son verre gothique nous versa le vin du voyage. »