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l’adieu de weimar

les humains, mieux que jamais j’ai senti que, malgré la vulgarité, l’endurcissement, la négation, la hâte grossière, le goût des bonheurs vils et des plates satisfactions, le flambeau ne saurait tomber à terre et s’éteindre. Aux ruines que font les hommes, en eux et autour d’eux, au pauvre orgueil étroit et toujours déçu de leur raison, quelque chose survit et survivra : la poésie éternellement nécessaire. Tous les besoins de l’esprit pourront changer de forme et d’objet, le besoin de poésie demeurera. Elle renaît de toutes les cendres. Enrichie d’avoir vécu parmi les trésors d’un gigantesque cerveau, elle va brûler un cœur pathétique. On a dit que l’individu est « l’addition de la race », ainsi chaque grand poète est fait de tous les grands poètes. Ils ne sont pas fraternels, ces inspirés, ils sont un : celui auquel un ordre divin s’impose, et qui avec mille voix successives, chante, afin que l’humanité respire…

Tel fut l’adieu que je reçus de Weimar, la fidèle et la pieuse.