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couragement triste qui donne le goût de s’abriter, de renoncer… Un an après la mort du prince de Wittgenstein il reçut les ordres mineurs dans la chapelle du Vatican.

La princesse imaginait pour lui une grande carrière ecclésiastique, et que, au moins, il rénoverait la musique religieuse. Mais il ne rénova quoi que ce fût, ne rencontra nul enthousiasme et, au bout de peu d’années, Rome l’étouffa si bien qu’il partit et revint à Weimar, où il s’installa pour quelques mois dans la petite maison au bord du parc. Peu après il accepta de diriger le mouvement musical à Pesth, partagea la majeure partie de son temps entre la Hongrie et la Saxe et ne passa plus à Rome que peu de mois.

Mme de Wittgenstein poursuivait avec une infatigable énergie ses pieux travaux. Lui, il avait goûté des émotions nouvelles et de plus d’une sorte. La tendresse demeurait pourtant, ils étaient toujours proches l’un de l’autre mais à la manière de gens qu’un obstacle transparent sépare, au travers duquel on se voit, on s’entend, et qui empêche qu’on se touche.

Ces relations bizarres, étroites et distantes tout ensemble, et qui durent comporter bien des amertumes se prolongèrent vingt ans. Puis Liszt mourut, loin de Carolyne, à Bayreuth, où il est enterré, loin aussi de la ville où ils se sont tant chéris.