Page:Bulteau - L ame des Anglais.pdf/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour autrui. Ils s’étaient jetés dans l’action avant d’avoir jugé, parce que agir leur plaît et que penser les ennuie. Le jugement survient ensuite. Il peut infirmer l’acte, mais ne saurait infirmer un jugement précédent puisqu’il ne s’en était encore produit aucun… Quand il fait des choses contradictoires, l’Anglais, suivant la logique particulière des muscles, ne se contredit pas véritablement : il se démontre.

Leur tempérament musculaire a donné à ces amoureux de l’effort la compréhension, et une estime chevaleresque de tous les efforts. Pourtant, ils accordent une plus grande sympathie à ceux qui durent. La persévérance leur plaît davantage que les brefs coups d’éclat dont les Latins s’enthousiasment. Et le spectacle d’une volonté qui s’obstine les convainc seul. « On nous appelle pour notre acharnement les dogues anglais », dit Talbot dans Henri VI ; et Cornélis de Witt s’écriait : « On peut les tuer, mais non les vaincre ! » Cet acharnement, ils le pratiquent pour satisfaire un besoin physique devenu besoin moral et ne se laissent séduire que s’ils le rencontrent chez les autres. Mais alors le résultat est assuré. En continuant très longtemps d’avoir tort, on finit par les persuader qu’on a raison, tant est puissant leur besoin de croire à la sainteté des vouloirs immuables.

Ils respectent les spécialistes, quels qu’ils soient,