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et les intentions de qui vient à sa rencontre. En outre, il n’a ni la souplesse qui incite à changer de forme, ni la sympathie rapide et universelle qui vous débusque de la retraite intime et y laisse une place à prendre. Ce qui n’est pas lui l’intéresse trop peu pour que, sans motif, il l’examine et le juge profondément. Si gens et choses deviennent son but ou s’opposent à son vouloir, il en prend connaissance à loisir, et adapte sa conduite aux nécessités de l’occasion. Pendant qu’il fait tout cela, rien de sa forme intime ne s’altère, aucune ligne ne fléchit, aucun angle ne s’émousse. Il s’est donné la peine de comprendre pour diriger et affermir son acte et non pour acquérir des notions susceptibles de changer son système intérieur, et sa représentation personnelle de soi, de l’Univers et de l’Humanité.

Les personnes pondérées et tranquilles prennent aisément pour de l’originalité le dégoût des contraintes, certains tics, précieusement cultivés, l’impatience de jouer un rôle, une pointe de désordre mental. L’originalité est précisément le contraire de ces choses. Lorsqu’on examine bien les gens qui « ne font rien comme tout le monde », ordinairement on découvre chez eux une sensibilité, un esprit faciles à asservir. Ces indomptables sont perpétuellement domptés, par n’importe quoi. Ils obéissent, sans le savoir, à la plus faible suggestion ; ils reproduisent, sans le vouloir, ce qui traverse leur champ visuel. Croyant in-