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savons qu’un homme qui possède est plus naturellement vertueux qu’un autre… – Aladin cesse de flâner par les rues, et cherche à s’instruire. Pour cela, il ne va pas dans les écoles, car il ne tient nullement à connaître les signes abstraits qui représentent les choses. Ce sont les choses elles-mêmes et leur réalité saisissable qui l’intéressent. Il fréquente les marchands du bazar, chez qui des vaisseaux apportent les produits des régions lointaines, et, avec eux, des renseignements actuels et vivants sur les coutumes des peuples.

En peu d’années, Aladin devient un charmant jeune homme, sans lettres, mais très informé et parfaitement pratique. Il continuerait cette vie médiocre fort longtemps, et peut-être toujours, si, un matin, apercevant la belle Bodroulboudour, la fille du sultan, il n’en devenait amoureux. À la minute, les choses changent ! Tant qu’il n’avait rien à conquérir, Aladin demeurait à demi inconscient du pouvoir formidable de sa lampe. Ses énergies n’étant pas sollicitées, son esprit dormait. Un but précis et difficile s’offre, tout s’éveille en lui. Ce que son intelligence en état de repos n’avait pas compris, sa volonté le comprend. Il sait ce que vaut sa lampe, parce qu’il y a là un objet à saisir. Et aussitôt il agit avec une décision merveilleuse. Il se procure des bijoux invraisemblables, élève en une seule nuit un palais d’or, d’argent et d’escarboucles, persuade le sultan, épouse la princesse et jouit de l’estime publique.