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excuses liminaires

tance ; on en gardait malgré tout de l’irritation et le désir vain d’expliquer que les Français ne sont ni tellement bêtes dans l’héroïsme, ni à ce point mal éduqués… Et lorsqu’un autre écrivain anglais prouve une fois de plus notre sensualité légendaire et notre manque de lyrisme en affirmant que nous appelons « laurier-sauce » l’arbuste que nous avons surtout coutume de nommer « laurier des poètes », n’est-on pas tenté de lui dire : « Pourquoi ne pas raconter les choses de chez vous ? »

Tous les peuples, j’imagine, ont envie de conseiller un emploi du temps, si sage, aux étrangers trop hardis qui se mêlent d’exprimer sur eux des opinions que nul ne leur demande…

On se risque, cependant ! C’est ce que je vais faire avec une inquiétude trop justifiée par mon incroyable prétention. Car enfin, si le besoin d’écrire sur l’Angleterre me pressait, ne pouvais-je m’en tenir à conter des histoires de vieux châteaux hantés, que des fantômes moroses sillonnent au clair de lune, sous le regard équivoque des portraits peints par Holbein ? ou encore à décrire des jardins incomparables, des réunions de salutistes, des fêtes éblouissantes, d’admirables visages, tout ce que, en passant, on aperçoit et goûte, même si on n’y comprend presque rien ? Quelle audace et quelle niaiserie de poursuivre, sous tant d’aspects, beaux, drôles, émouvants, les raisons secrètes qui ont permis que des fleurs fus-